La mort de Ben Laden: une magnifique opération militaire gâchée par la com?

Temporairement pour vous faire languir de la description des photos qui illustrent mon site internet, j’aborde, je décortique sommairement un sujet d’actualité: la mort de Ben Laden.

Du point de vue militaire, une magnifique opération. Même le crash d’un hélico et sa destruction avaient été prévus. L’objectif de tuer ou au moins de capturer la cible est atteint. Bravo.

Très rapidement le Président Obama annonce avec un plaisir visible le succès de l’opération « Justice has been done! ». Well done: c’est sobre, victorieux mais pas trop. c’est émouvant: une belle intervention à retenir pour l’histoire.

Le communicant essaye, imagine alors la suite: le ménagement diplomatique du Pakistan, des musulmans, la ligne de conduite étroite entre et la franche satisfaction et la retenue pour éviter que cette victoire réelle n’apparaisse comme une provocation. Il faut aussi penser à ce que l’on peut dire sur l’opération: peut-on parler des hommes qui ont agi? De leur mode d’action, certainement pas, ce serait remettre en cause des mois, voire des années d’entraînement. Beaucoup de choses à faire et à penser en de telles circonstances. En revanche, il va falloir expliquer ce qui a été fait du corps, de l’entourage présent, montrer quelques images, lesquelles etc… On imagine le discours, la répartition des rôles dans les interventions, le cadencement de ces dernières, entre le politique et le militaire…Bref quel bel exemple potentiel de communication anticipée, préparée à l’instar du coup de main lui-même.

Or à quoi assiste-t-on? A une succession d’imprécisions. Ben Laden est mort parce qu’il tenait une femme en bouclier, puis non, il n’était pas armé. Il a eu une sépulture selon le rite funéraire musulman, mais il a été immergé et n’est pas retourné à la terre nourricière. On apprend que le président Obama a suivi en direct l’opération. On le voit tendu en regardant un écran. Alors  pourquoi ne pas montrer les images vues par le président? Pourquoi allécher le public et ne rien lui donner. Pour préparer la présidentielle qui approche et montrer un président dans l’action un président qui s’investit? Le gouvernement pakistanais n’a pas été mis dans la confidence de l’action, donc les Américains ne lui font pas confiance, or ils sont alliés… Faut-il montrer la photo du mort? La Maison blanche hésite. Image trop violente… Le public américain et même mondial n’a pas l’habitude de voir de telles horreurs… c’est vrai, j’oubliais.

A mon avis, comme pour le déclenchement de la guerre en Irak, les Américains ont magnifiquement préparés la guerre, mais pas l’après-guerre. Il y a eu un télescopage de lignes de communication. Et l’après-guerre cela commence par la stratégie de communication, les effets à obtenir pendant et après l’action principale. Cela a peut-être été prévu, mais le résultat n’a pas été à la hauteur de l’opération elle-même. Dommage. Les communicants ne sont pas que des organisateurs de cocktails, des experts en médias-training. Ils peuvent être stratèges, des planificateurs aussi. Leur rôle c’est mettre du liant pendant la préparation, c’est parachever un excellent travail, c’est mettre la cerise sur le gâteau. Dans ce cas la cerise manque franchement.

Dommage.

4 réponses à “La mort de Ben Laden: une magnifique opération militaire gâchée par la com?

  1. Analyse très intéressante… Si je perçois parfaitement le lien avec le rôle des communicants, j’ai cependant du mal à comprendre en quoi cet article peut répondre aux attentes d’entreprises en terme de communication… Est-ce pour montrer l’importance de la communication dans notre société à tous les échelons, partir de l’échelle mondiale pour souligner sa place à l’échelle locale ?

    • Merci Sophie pour ce commentaire. L’idée sous-jacente est de montrer que la communication ne s’improvise pas et qu’elle doit se travailler dans la durée, que l’effort doit être continu et cohérent.

  2. Le problème c’est surtout de savoir quel message pour quel public, de savoir quel est son public.
    A mon humble avis, et d’après certaines infos qui ont depuis filtrées, il était hors de question de ramener OBL vivant. Pour le ramener où? A Gitmo (Guantánamo Bay) que Barack Hussein Obama avait juré de fermer il y a deux ans déjà? A New York pour lui lire ses Miranda Rights et lui donner les mêmes protections qu’à n’importe quel citoyen américain? Les Américains se seraient régalés de voir Ben Laden marcher en canard dans son pyjama orange et des chaînes au pied, pas Obama ni les fadas islamistes du Moyen Orient. Les Américains se seraient régalés de voir les photos , pas Obama ni les fadas islamistes du Moyen Orient.
    Pour faire bref, on peut pas communiquer 365 jours de soleil par an et un enneigement de rêve, on peut pas vendre le même produit aux esquimaux et aux nomades du Sahara. Sinon, ça bloque forcement très rapidement.

    • Oui. Comme tout n’est pas possible en politique on ne peut pas tout faire en communication politique. Mais pour autant cela n’empêche pas de travailler correctement les axes complémentaires de la communication, ici la communication que les Français qualifient à tort à mon sens « d’opérationnelle ». La communication sur l’opération OBL n’a pas été bonne et ce qui a suivi ne fait que confirmer malheureusement mon analyse.

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